A quelques jours du Salon de l’Agriculture, le Premier Ministre Gabriel Attal a annoncé un certain nombre de mesures pour répondre à la crise agricole. Parmi elles, une réorientation du pilotage du programme Ecophyto, à travers le changement d’indicateur retenu pour évaluer l’utilisation des produits phytosanitaires en France. Si l’AGPB salue cette décision, des zones d’ombres demeurent sur sa mise en application concrète dans les exploitations, alors même que les céréaliers restent confrontés aux impasses agronomiques et à une conjoncture économique qui met en péril la pérennité des exploitations.
HRI-1 : un premier pas vers la cohérence … à confirmer
En dotant enfin la France d’un indicateur de mesure européen (HRI-1) en remplacement du NODU, le Premier Ministre fait le choix du pragmatisme et de la cohérence.
Un choix pragmatique et réaliste, car cet indicateur, en mesurant bien la réduction des risques des produits utilisés et non l’augmentation de leur dose, permettra une évaluation plus pertinente des efforts menés par les agriculteurs sur leur exploitation. Les céréaliers, ne cessent d’adapter leur pratique pour accompagner les défis environnementaux. En 20 ans, ils ont réduit de 46% l’utilisation des produits phytosanitaire en quantité de substance active (QSA).
Un choix cohérent ensuite, car il favorise une harmonie des politiques agricoles au niveau européen, mettant fin à des années de surtransposition et de distorsion de concurrence qui pèsent lourdement sur les exploitations.
L’AGPB attend à présent une traduction rapide de cette orientation dans les faits.
Investir dans des solutions, non dans la délation !
L’AGPB regrette en revanche de nombreuses zones d’ombres avec le maintien de dispositifs à la fois stigmatisant et contraignants En effet, alors que les acteurs de grandes cultures attendent que l’Etat accélère ses investissements pour bénéficier de solutions alternatives, ils se retrouvent confrontés à des dispositifs de délation qui ne créent pas les bonnes conditions pour mener une transition dans la confiance et la durée.
Ne pas retomber dans le piège des surtranspositions économiquement insoutenables
Enfin, les céréaliers attendent d’avantage d’éclaircissements concernant les zonages qui pourraient concerner jusqu’à 30% des bassins de production et qui créeraient de facto une nouvelle situation de surtransposition insoutenable dans le contexte économique actuel.
Alors que les cours du blé ont dévissé ces derniers jours jusqu’à 166 €/ t, les céréaliers ne couvrent plus leurs coûts de production depuis des mois. Après une année 2023 où les résultats des exploitations ont singulièrement plongé dans le rouge, 2024 s’annonce comme l’année de tous les dangers pour les céréaliers français.
Les filières restent néanmoins proactives pour accompagner les transitions. Depuis un an elles travaillent et proposent des projets innovants dans le cadre du PARSADA, les céréaliers attendent désormais des actes concrets et de la confiance pour réussir le développement de solutions alternatives.
Eric Thirouin, président de l’AGPB : « Cette crise profonde est le reflet d’un changement de cycle qui impose à nos dirigeants européens de changer drastiquement leur vision en matière de politique agricole, pour la rendre plus réaliste face aux enjeux des exploitations. Des premières annonces vont dans le bon sens, nous attendons des actions fortes à présent. A l’arrivée du Salon de l’Agriculture, nous y voyons l’opportunité de remettre l’agriculture au cœur d’un projet commun, qui redonne aux agriculteurs les moyens de produire, pour nourrir les citoyens tout en respectant la planète et en vivant dignement de notre travail ».