Assurance récolte : une belle victoire syndicale concernant les modalités de la réforme

Après plusieurs mois d’âpres négociations entre la profession et le Ministère, les nouveaux paramètres qui vont déterminer l’impact de la réforme de l’assurance climatique pour les producteurs sont presque intégralement connus. Dès 2023, les producteurs de grandes cultures pourront s’assurer avec une franchise à 20% subventionnée à 70%, concrétisant l’accord omnibus obtenu au niveau européen il y a 4 ans, à un tarif plus attractif.

Grâce à une négociation en rangs serrés derrière la FNSEA, dans laquelle l’expertise de l’AGPB a été déterminante jusque dans les dernières heures, les producteurs de grandes cultures auront à leur disposition une assurance climatique rénovée et surtout plus pérenne dans les années à venir, à des coûts rendus plus intéressants par le biais de la réforme.

Le décret  qui va être publié favorisant le développement de l’assurance récolte établit notamment les fourchettes de déclenchement de cette assurance. Il définit certaines notions telles que la franchise, le rendement et le prix assurés, et fixe le taux de prise en charge de la prime par l’État. Il donne également les principes de calcul de l’indemnisation fondée sur la solidarité nationale.

En effet, l’application de l’accord omnibus obtenu au niveau européen en 2018 va enfin être appliqué en France au 1er janvier 2023 : le seuil et la franchise de 20% de perte bénéficieront d’une subvention de 70% alors qu’actuellement les subventions s’arrêtaient à 65 % pour la franchise 30% et 45% pour la franchise entre 25 et 30%, et donc 0 pour la franchise entre 20 et 25% . En moyenne, les producteurs s’assuraient essentiellement avec une franchise de 25%, et bénéficiaient de 61% en moyenne pondérée de subvention, demain ce sera donc 9 points de mieux (70%) qui reviendront au producteur.

Concrètement, c’est donc un espoir de voir les restes à charge nets (prime brute moins subvention) de l’assurance récolte s’améliorer à niveau de garantie identique (franchise identique et capital assuré identique) ou au pire se stabiliser si les compagnies d’assurance prévoient de rééquilibrer leur équilibre économique à l’occasion de la réforme, par l’augmentation de cette subvention que les producteurs toucheront 12 à 18 mois après la souscription.

Pour la franchise 20%, le producteur n’aura plus demain que 30% de son coût à sa charge, ce qui doit inviter toutes les régions à reconsidérer l’intérêt de l’assurance climatique comme outil de gestion de ses risques. L’accès à l’omnibus à 20% est également une réponse partielle aux producteurs dont les références calculées en moyenne olympique avaient tendance à baisser avec la répétition des aléas.

A ce jeu de subvention augmentée, se conjugue un accès pour tous les producteurs de grandes cultures au fonds de solidarité nationale, ce qui est une grande nouveauté, puisque les grandes cultures étaient exclues du dispositif des calamités alors qu’elles le finançaient.

En annexe du décret sont précisés les taux de déclenchement de la solidarité nationale par culture et les taux d’indemnisation des non-assurés. En grandes cultures, viticulture, arboriculture et prairies, ces taux seront dégressifs sur trois ans : en 2023, 45 % des dégâts seront indemnisés (90 % pour les assurés), puis 40 % en 2024 et 35 % en 2025.

En outre, concernant les productions pour lesquelles il n’existe pas d’offre assurantielle à l’heure actuelle (apiculture, maraîchage diversifié, plantes médicinales, semences…), le ministère propose un taux d’indemnisation publique de 45%, sans dégressivité. Le seuil de déclenchement s’établirait à 30% de pertes, comme pour l’arboriculture et les prairies.

 

Ces indemnisations par le fonds de solidarité nationale n’auront lieu pour les non assurés qu’au-delà d’un seuil fixé à 50% de pertes en grandes cultures et viticulture (alors que l’administration avait initialement proposé 60% de pertes) et 30% pour la prairie et l’arboriculture.

Pour les producteurs assurés, cette solidarité nationale viendra alléger les indemnisations que devront payer directement les assureurs et en conséquence fera baisser la prime d’assurance brute, avant subvention, pour les producteurs, d’environ 10% pour le secteur des grandes cultures. Grâce au guichet unique, le producteur ne traitera qu’avec son assureur pour les primes et indemnités d’assurances.

La  FNSEA et ses AS restent vigilantes pour les dernières modalités qui seront fixées au niveau du cahier des charges dans les prochains jours, notamment le maintien des garanties subventionnées et le niveau des prix retenus pour le calcul du droit à la subvention afin de tenir compte de la hausse des coûts de production.

 

Cette combinaison d’une subvention plus élevée et d’une prise en charge par la solidarité nationale devrait donc rendre l’assurance climatique plus attractive pour les producteurs, y compris pour une meilleure couverture de leur risque jusqu’à 20% de franchise.

L’enveloppe budgétaire revalorisée à 680 M€ grâce à nos efforts et promise par le Président de la République à Terres de Jim (contre 600 M€ 1 an auparavant) devrait donc permettre un développement significatif de l’assurance d’ici 2025 sans remise en cause de ces acquis.  (objectif de 40% des surfaces assurées en grandes cultures contre 32 % actuellement)

Il nous restera à en convaincre les producteurs sur le terrain en faisant preuve de pédagogie pour leur permettre de raisonner leur décision de couverture de leurs risques, par l’assurance climatique et/ou l’épargne de précaution sur laquelle nos efforts continuent de se porter dans le cadre de la loi de finance qui va être débattue cet automne.