Le projet prospectif Culturibles a été initié il y a 3 ans par les 4 Associations spécialisées représentant les intérêts des producteurs de grandes cultures, afin d’explorer les futurs possibles à l’horizon 2030 pour ces productions en France. Ce projet a impliqué des producteurs agricoles, des experts des instituts techniques et des organisations de ces filières, en prenant en compte - dans une démarche à 360°- tous les facteurs impactant la production de grandes cultures, qu’ils soient techniques, sociétaux, environnementaux, politiques ou économiques. Il propose des scénarios chiffrés avec leurs impacts pour rentrer dans le débat du futur souhaité pour notre agriculture.
Les futurs possibles ont été envisagés dans la perspective d’une transition agroécologique impérative - qui conditionnera les innovations à venir, et dans le cadre de marchés mondiaux ouverts et concurrentiels. 4 scénarios, probables et cohérents avaient initialement été dessinés pour balayer les champs du possible à l’horizon 2030, puis évalués sur leur durabilité : qu’elle soit environnementale, mais également sociale et économique. Cette durabilité appelée par les citoyens et les politiques a été traduite sous forme d’un équilibre de performances entre 3 dimensions : l’environnement, la résilience des exploitations et l’économie des filières.
L’équipe Culturibles a choisi d’actualiser les scénarios en 2022 au regard de l’’intensité de la crise énergétique et géopolitique avec le conflit ukrainien en se concentrant sur 2 scénarios :
· Un premier scénario inspiré de la trajectoire Farm to fork et du green deal, plaçant l’agriculture sous contraintes, mais sans prendre les virages politiques facilitant les innovations de rupture (telles que les NBT)
· Un second scénario plus volontariste baptisé « agriculture solutions » dans lequel l’agriculture française a réussi à rentrer dans un débat plus co-construit avec la société. Après avoir fait la démonstration de l’éventail des solutions qu’elle peut apporter, l’Agriculture sait aussi relever les défis sur la sobriété des ressources, à condition que les politiques permettent d’accélérer le déploiement de ces solutions dans les exploitations agricoles.
Ces travaux ont été présentés à la FNSEA qui a salué l’effort de la profession agricole de grandes cultures de rentrer de manière sérieuse, chiffres à l’appui, dans le débat sur son avenir. Ils ont également fait l’objet d’une présentation comparée dans le cadre des journées Phloème organisées par Arvalis avec d’autres prospectives plus normatives, telles que Afterres 2050, les scénarios de transition à 2050 de l’ADEME. Un approfondissement des impacts pour l’élevage est également à l’étude avec l’appui des organisations spécialisées.
Une déclinaison régionale sera mise en débat également début 2023 avec des acteurs régionaux en Bretagne qui ont réfléchi avec le scenario Bretagne 2040 à l’avenir des productions animales de leur région.
L’analyse se poursuit en comparant avec d’autres travaux de prospectives qui se placent plutôt dans une logique de « back casting », c’est-à-dire d’arrivée à la neutralité carbone en 2050 , coûte que coûte, et de réflexion rétrospective des politiques à mettre en œuvre pour y parvenir.
L’exercice proposé par la Profession agricole des grandes cultures avec Culturibles se veut plus exploratoire, en examinant les conséquences des choix politiques à court terme, à partir des acteurs de ces transitions que sont les agriculteurs, pour tendre vers ces mêmes objectifs.
Culturibles peut donc servir de porte-voix du monde agricole dans les débats de planification écologique et énergétique ou dans la loi d’orientation agricole annoncés pour 2023.
L’enjeu est de proposer d’autres pistes que celles des scénarios omniprésents dans les médias qui proposent une réduction de l’agriculture française pour répondre aux défis environnementaux.