La polémique de l’automne dernier sur le renouvellement de l’homologation du glyphosate, avait conduit l’Assemblée nationale à se saisir de cette problématique, créant ainsi une mission d'information plus globale sur « l’utilisation des produits phytosanitaires ». Composée de 22 députés dont Matthieu Orphelin (LREM), Jean-Baptiste Moreau (LREM), Delphine Batho (PS), Gérard Menuel (LR), Antoine Herth (Agir), Mathilde Panot (F.Insoumise) ou Hubert Wulfranc (PC) et présidée par Elisabeth Toutut-Picard (LREM), les membres ont présenté leur rapport mercredi 4 avril.
LE GLYPHOSATE, UN SUJET TOUJOURS AUSSI POLEMIQUE
Delphine Batho, ancienne ministre de l'Ecologie de François Hollande, Vice-Présidente de la mission d’information a annoncé sa démission, « déçue » des propositions formulées, qui ne sont «pas à la hauteur» de la mission d'information. Une décision essentiellement motivée par le fait que «le projet de rapport ne prône pas la sortie du glyphosate ni même son interdiction dans trois ans ».
Le rapport suggère effectivement « d'interdire, dans l'immédiat, l'utilisation du glyphosate dans sa fonction dessiccative au niveau national ». Philippe Pinta a ainsi rappelé à l’AFP : « Nous, on ne l'emploie qu'après moisson sur les champs, c'est le soleil qui fait le boulot » pour déshydrater la plante, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays comme le Canada.
5 PRIORITES ET 35 PROPOSITIONS
La mission parlementaire vient effectivement de rendre publique ses 35 propositions qui seront remises prochainement au gouvernement. Elles prônent davantage de prévention et d’information sur l’usage et l’impact des phytosanitaires auprès du citoyen et des utilisateurs.
Parmi les 35 actions envisagées, on peut relever les éléments importants suivants :
- La mise en place d’un dispositif national de surveillance des pesticides dans l'air et la fixation d’un seuil de détection
- L’évaluation systématique de l’impact de l’usage des phytos et solutions alternatives
- L’encouragement massif aux solutions de biocontrôle
- Le développement et la diffusion à grande échelle de l’agriculture de précision
- La suppression progressive des insecticides de stockage
- L’instauration d’une prime à la casse pour les pulvérisateurs de plus de 25 ans.
- Une veille attentive sur la dissociation du conseil et de la vente, pour que cela n’entraine pas de charges supplémentaires pour les agriculteurs.
- La création d’un fonds de financement de recherche publique d’alternatives au phytos.
Ces actions vont pour la plupart dans le sens du Contrat de solutions proposé par le monde agricole en fin d’année dernière. « Il s’agit de trouver des solutions plutôt que des interdictions » comme le rappelle régulièrement Éric Thirouin.
La mission d’information rappelle par ailleurs que le zéro pesticides « prendra du temps ». Ainsi, sur le glyphosate, les rapporteurs jugent « nécessaire d'accélérer les travaux de recherche et de développement pour trouver des alternatives crédibles ».
QUELLE COHERENCE EUROPEENNE ?
Certains membres de la mission d’information comme Antoine Herth (Les Constructifs, Bas-Rhin), ont également réagi sur les avancées et les manques du rapport de la mission. La mission, selon lui, a focalisé « son attention sur les grandes cultures et la vigne, secteurs qui concentrent l'essentiel des volumes de spécialités chimiques ». Il pointe du doigt notamment l’incohérence de raisonner la réduction des phytos dans un cadre franco français ou purement européen, ouvrant la porte ainsi à « des importations de produits agricoles traités avec des pesticides interdits en Europe ». Antoine Herth souligne « que nos partenaires dans l'Union sont loin de partager notre choix quantitatif (réduction des volumes) privilégiant une approche qualitative (réduction des impacts). Il est important qu'un grand nombre de pays membres se retrouvent autour d'une même politique vis-à-vis des pesticides afin de réduire les distorsions de règles entre producteurs sur le marché intérieur. »
Sources AFP, Blog Antoine Herth