Farm Europe, organisation européenne réunissant les acteurs agricoles européens, organisait les 15 et 16 novembre derniers un colloque sur les stratégies européennes au travers du Green Deal et de Farm to Fork. L’AGPB a répondu présente réaffirmant à cette occasion ses ambitions en matière de croissance agricole.
Farm Europe réunissait ses partenaires et invités en Belgique pour sa 5ème édition du Global Food Forum sur le thème "The Green Deal : how can the Green Deal be a good deal ?", Comment faire du green deal un bon deal ? D'éminentes personnalités des institutions européennes, des ministres nationaux comme celui de l’Espagne, l’Irlande ou de la Belgique fédérale, des dirigeants économiques et des personnalités qualifiées de la société civile ont répondu présentes pour débattre des meilleures conditions dans lesquelles le Green Deal pourrait être appliqué dans le futur.
Au travers de séance en plénières et de différents ateliers de travail, les invités ont pu développer leurs convictions et comprendre les positons parfois antagonistes des filières et des Etats membres.
FARM TO FORK, PLAN BIODIVERSITE & GREEN DEAL AU CŒUR DES DISCUSSIONS
Les stratégies Farm to Fork (de la ferme à la fourchette) et Biodiversité, proposées par la Commission européenne(CE), ont été développées dans le cadre du Pacte Vert Européen, dit Green Deal, une ambition politique des états membres qui doit orienter et cadrer les futures règlementations européennes.
Ces stratégies visent à la réduction des impacts de l’agriculture et du système alimentaire européens sur l’environnement, et sur les émissions de gaz à effet de serre. Pour ce faire, la CE se fixe 4 objectifs d’ici à 2030 :
- Réduire de 50 % de l'utilisation globale des pesticides, et de 50 % de l'utilisation des pesticides les plus dangereux
- Viser +25 % d’agriculture biologique
- Réduire l'utilisation des engrais d'au moins 20 %
- Atteindre 10% des surfaces agricoles converties en éléments de paysage à haute valeur environnementale.
L’étude d’impact de la CE, réalisée par son département recherche (JRC), montre que les résultats ne correspondent pas aux attentes des stratégies déployées. Selon cette étude publiée en catimini durant l’été, l’application des objectifs ci-dessus conduirait à :
- Une baisse de production de plus de 10% dans tous les secteurs agricoles
- Une dégradation de la balance commerciale avec une augmentation des importations et une diminution des exportations.
- Une diminution des revenus des agriculteurs dans presque tous les secteurs agricoles.
- Une augmentation généralisée des prix pour les consommateurs.
- Une réduction de 20% des émissions agricoles de GES dans l’UE, mais avec transfert des émissions hors UE
DES ORIENTATIONS AUX INTENTIONS LOUABLES MAIS TROP DECONNECTEES DE LA REALITE
L’application de ces stratégies pourrait donc conduire à l’opposé de ce pourquoi elles ont été créées. INCROYABLE ! Pourtant, l’objectif d’une transition de l’économie européenne et de son agriculture vers une économie bas carbone ne fait pas débat, mais les voies et moyens proposés pour y arriver doivent s’ancrer dans la réalité en s’opposant aux positionnements démagogiques.
« La Commission se dit prête à bouger, et bien nous sommes prêts aussi ! à la condition qu’on prenne le sujet par le bon bout. » a déclaré Eric Thirouin lors de son allocution de clôture.
Plutôt que de commencer par de nouvelles contraintes, il s’agit de commencer par l’accompagnement, l’incitation et l’encouragement des initiatives prises par le secteur lui-même. Pour tous les secteurs, il existe aujourd’hui des solutions porteuses de gains environnementaux substantiels ne délitant pas les impératifs économiques. Pour en récolter les fruits à grande échelle, il faut programmer pour l’UE un choc d’investissement et de diffusion de l’innovation.
« Actuellement c’est seulement via la fourche et non la fourchette. Que fait concrètement la Commission sur la politique de la fourchette, envers le consommateur ?»
Eric Thirouin a rappelé une fois de plus devant les invités et plusieurs ministres de l’agriculture. « La nécessité de retrouver les équilibres dans ces orientations politiques », seuls garants d’un développement économique durable. Un représentant italien, à ce titre, a rappelé qu’on ne peut pas « faire une agriculture verte avec une agriculture dans le rouge ! »
Toutes les études d’impact, USDA et JRC en tête « décrivent des baisses de production , de revenu et des effets contradictoires sur les émissions de GES. C’est intensification à droite et jachère à gauche, Où est l’équilibre ? et quelle place géostratégique, l’Union européenne veut-elle prendre demain ? »
Ce Global Food Forum 2021 a été le théâtre d’échanges riches et parfois tendus sur le devenir de l’Europe agricole, mais a permis l’expression d’une diversité de témoignages importants dans la perspective des échéances à venir et en particulier de la Présidence française de l’Union Européenne des le 1er janvier prochain.