EGALIM : veut-on réellement renforcer l’organisation économique des producteurs ?

Le projet de loi issu des EGA, examiné en séance publique à l’Assemblée nationale à partir du 22 mai, prévoit parmi les différents amendements en discussion de supprimer les 3R (Rabais, ristournes, remises) sur le marché des phytosanitaires, avec l’idée claire de faire augmenter le prix de ces produits pour inciter à baisser leur consommation dans la même logique que le tabac. A cela s’ajoute avec la feuille de route phyto, récemment présentée par le gouvernement, l’augmentation de la taxe ou redevance pour pollutions diffuses (RPD) prélevée sur ces produits.

Cette disposition de la loi n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact comme le rappelle le Conseil d’Etat dans son avis. Aussi, une mission express a été mise en place par le Ministère de l'agriculture et le Ministère des finances, auprès du Médiateur des relations commerciales agricoles, Francis AMAND, pour « dresser un état des lieux qualitatif des différentes pratiques commerciales (Rabais, remises et ristournes ou 3R) concernant les produits phyto, en prenant en compte les différents stades de la chaîne économique. »  Cette réaction dans l’urgence révèle une fois de plus l’amateurisme des pouvoirs publics sur ces sujets et leur méconnaissance flagrante du fonctionnement du marché des phytos.

Les coopératives de collecte et d’approvisionnement se sont organisées en centrale d’achat afin de répondre à la commande de leurs associés coopérateurs de les fournir en produits phyto à des prix abordables, en  jouant le rôle de bouclier protecteur entre les agriculteurs et les firmes. Si demain on leur interdit de négocier ces fameux « 3R » ce sont environ 300 M€ de charges supplémentaires pour les agriculteurs.

Plus grave encore, ces 3R étaient au cœur de l’optimisation économique des coopératives de collecte-approvisionnement. Outre, les conséquences sociales dans les entreprises, l’agriculture française devra faire face à une désorganisation probable de son approvisionnement en intrants et sans doute une baisse du prix payé aux producteurs sur les grains.

JM Bournigal a été auditionné pour l’AGPB le 14 mai par le Médiateur. Il a ainsi exposé le risque de remise en cause de l’organisation économique que cet amendement fait peser sur la filière céréalière. Il est en effet en totale contradiction avec l’esprit initial du projet de loi dont l’ambition est de rééquilibrer les relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire.

Si l’on rajoute la volonté du gouvernement de séparer la vente et le conseil dans l’objectif de casser les « incitations » à la consommation des produits phytosanitaires, c’est toute la compétitivité de la filière grandes cultures françaises qui sera mise à mal avec des hausses de charges programmées.

randomness