Le coronavirus met la production agricole sur le devant de la scene

Alors que le divorce semblait sur le point d’être prononcé entre les français et leurs agriculteurs, la crise du coronavirus remet le secteur au centre de l’attention. Des inquiétudes demeurent sur la main d’œuvre et le transport des denrées alimentaires.

L’épidémie de coronavirus va-t-elle réconcilier les français avec leur agriculture ? Mise à rude épreuve par les attentes fortes de la société sur l’évolution du modèle de production agricole, la relation des Français avec le mode agricole connait un virage radical en pleine épidémie de coronavirus.

Le gouvernement s’est emparé du sujet en remerciant publiquement les salariés du secteur agroalimentaire pour la continuité de l’approvisionnement alimentaire des français. « La santé et l’alimentation sont les deux préoccupations principales de nos concitoyens.  Se nourrir est fondamental, et quand tout semble se dérégler, chacun le mesure à sa juste valeur » a souligné le ministre de l’Economie Bruno Le Maire dans une lettre publique. « Vous, salariés des coopératives, des PME et des industries de l’agro-alimentaire, êtes un maillon essentiel de cette chaîne d’approvisionnement. C’est vous qui fournissez une alimentation de qualité, sûre, tracée, quelles que soient les conditions que les mesures de protections sanitaires nous imposent. Les Français s’en rendent comptent, aujourd’hui plus que jamais » a-t-il insisté.

Et dans son discours aux Français du jeudi 12 mars, le président Emmanuel Macron avait rappelé le statut de bien fondamental de l’agriculture, au même titre que la santé.  « Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie au fond à d’autres est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle, […]  Les prochaines semaines et les prochains mois nécessiteront des décisions de rupture en ce sens. Je les assumerai.

Alors que le confinement général en France a déclenché une ruée sur les produits d’épicerie tels que les pâtes et des pénuries ponctuelles en rayon, la question de l’approvisionnement et de la continuité de la chaîne de production alimentaire, de la ferme à l’assiette, et devenu une préoccupation politique de premier ordre.

Du côté des associations professionnelles, le message aux Français se veut rassurant. « Rassurez-vous, outre le personnel soignant vous pouvez également compter sur les agriculteurs qui sont toujours en activité pour assurer la production de la fourche à la fourchette ! » a rappelé sur Twitter un représentant des Jeunes agriculteurs.

Même son de cloche du côté du principal syndicat agricole, la FNSEA, qui a rappelé que « les agriculteurs sont au rendez-vous de l’effort national, et mettent sur la table des Français des produits frais au quotidien, sans risque de rupture. »

Si le risque de pénurie est écarté à la fois par le politique et le monde agricole, de multiples questions persistent sur la manière d’assurer la production française en période de confinement général.

Selon le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume, « si les rayons de certains commerces de détail peuvent être momentanément vides, uniquement du fait de comportements de certains clients, l’ensemble des professionnels ont réaffirmé que les stocks de marchandises alimentaires et de produits de première nécessité étaient suffisants pour assurer l’approvisionnement de la population française pour plusieurs semaines ».

Dispositions exceptionnelles

Un certain nombre de décisions se sont ainsi imposées pour permettre aux agriculteurs de poursuivre leur travail. Les magasins de fournitures nécessaires aux exploitations agricoles et d’entretien et réparation de matériel agricole ont par exemple obtenu la possibilité d’accueillir du public jusqu’au 15 avril, afin de ne pas entraver le bon fonctionnement des exploitations.

Autre mesure d’accompagnement, la période de déclaration des aides à la Politique agricole commune   a été reportée au 15 juin au lieu du 15 mai. Une demande initiée par l’Espagne et l’Italie.

Inquiétudes sur l’emploi saisonnier

Pour autant, certains défis vont apparaitre, notamment la question de l’emploi saisonnier, dont le secteur agricole est un gros consommateur

« Alors que les récoltes débutent, que les semis des cultures de printemps ont commencé, les agriculteurs employeurs sont extrêmement préoccupés par la fermeture des frontières. Nous craignons que le besoin de main d’œuvre sur les exploitations agricoles ne soit pas satisfait et que des productions soient perdues » a souligné la FNSEA dans un communiqué.

L’emploi saisonnier, notamment de travailleurs étrangers, permet d’absorber le surplus de travail dans les périodes de récolte. Et la fermeture des frontières décidées par l’UE et le France pourrait compliquer le recrutement d’une main d’œuvre venant souvent d’Espagne ou même du Maroc.

Autre écueil, celui de l’acheminement des marchandises. La chaîne logistique de l’agroalimentaire devrait être maintenue pour permettre le transport de marchandise, a affirmé le ministère des transports, notamment en maintenant ouvert les stations essence et autres aires de repos pour poids-lourds.

Source: Cécile Barbière | EURACTIV.fr | 19 mars 2020

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