Réécriture à risques pour l’arrêté phyto de 2006
Annulé l’été dernier par le Conseil d’Etat, l’arrêté du 12 septembre 2006 réglementant l’utilisation des produits phytosanitaires (zones non traitées, dites ZNT, dérives, gestion des effluents ) cessera de s’appliquer le 6 janvier 2017. Aussi les ministères concernés (Agriculture, Environnement, Santé, Finances) ont-ils rédigé un projet de nouvel arrêté récemment diffusé. Mais ils ne s’en sont pas tenus à soigner cette fois les formes. Surfant sur l’air du temps en matière de phytos, ils ont introduit dans leur projet de nouveaux zonages et de nouvelles contraintes, comme si les producteurs de céréales n’étaient pas suffisamment dans la détresse ces temps-ci !
Nouveaux zonages, nouvelles restrictions, nouveaux casse-têtes
Comme on le sait, le système de 2006 offrait la possibilité aux agriculteurs de réduire à 5 mètres les largeurs des ZNT aux abords des points d’eau en mettant en œuvre un dispositif antidérive ou en effectuant des aménagements tels que haies, bandes enherbées…Ce principe a encouragé les agriculteurs à se munir de systèmes innovants pour réduire la dérive des produits phytosanitaires. Or, le nouveau texte rédigé par les ministères imposerait aux agriculteurs des zones non traitées non seulement le long des cours d’eau – et ce jusqu’à 50 m dans certains cas-, mais également aux abords des fossés et près de zones non cultivées adjacentes aux cultures (ZNCA). En outre, le projet prévoit l’instauration supplémentaire d’une zone de protection en périphérie des lieux d’habitation, alors que la récente loi d’avenir pour l’agriculture a déjà instauré un dispositif de ZNT spécifique pour les lieux fréquentés par un public sensible (écoles, hôpitaux etc.) et que des arrêtés préfectoraux dits « lieux sensibles » sont en cours d’élaboration à ce sujet.
Ce ne sont là que quelques exemples de ce qu’il est proposé d’ajouter à la réglementation actuelle, qui montrent combien la réalité peut être méprisée. Peut-être les têtes pensantes parisiennes croient-elles que les parcelles agricoles sont toutes rectangulaires et rectilignes, que soustraire à la production des surfaces importantes surfaces serait indemnisé par la collectivité, que pour réduire ses largeurs de ZNT, un agriculteur saura facilement résoudre de complexes équations à base de pourcentage de réduction de dérive grâce à son dispositif ad hoc et, simultanément, de « moyens complémentaires visant à réduire l’exposition à la dérive » (MCRED)… Par ailleurs, quel agriculteur peut-il admettre que pour protéger les arthropodes le long des bois (ZNCA), il serait nécessaire d’installer une haie le long de la lisière ?
La simplification des normes en agriculture : un impératif à respecter
La norme doit être réaliste et lisible pour être admise, comprise et appliquée. En ces temps de crise, les producteurs de céréales sont d’autant plus choqués d’être en bute à de nouvelles contraintes aussi infondées et tendant à retirer pratiquement de la production une part non négligeable de la SAU. Cet abus de réglementation conduirait de plus à des distorsions de concurrence supplémentaires avec les autres producteurs européens et pourrait devenir source d’insécurité juridique.
Il faut revenir à la raison et rappeler à notre gouvernement les propos du Premier ministre le 3 septembre dernier : "l excès de réglementations joue contre nos exploitations dans la concurrence européenne et mondiale."
Le comité de rénovation des normes en agriculture mis en place depuis le mois de mars doit prendre tout son sens aujourd’hui. Notre profession entend bien y dénoncer le projet de nouvel arrêté.